Following
Grandmaster Allyps
Allyps Linkletter

In the world of Royaumes des Cieux

Visit Royaumes des Cieux

Completed 4206 Words

Histoire

1 0 0

Naissance de l’Oracle-Entre-Les-Étoiles

L’Oracle-Entre-Les-Étoiles, aussi nommé Eistibus, vit le jour à l’aube de la Création, à l’époque reculée des royaumes de Tohou. Son apparition ne fut pas le fruit d’une gestation naturelle, mais le résultat direct d’un acte de parole : ce fut l’Adam Kadmon lui-même, première incarnation du Créateur, qui prononça son nom, le faisant surgir du Verbe divin. En langue élohienne, Eistibus signifie « futur », et ce nom fut choisi avec précision.

À cette époque, la Création était instable. Les deux premiers primordieux issus de la Parole divine, le Psychopompe et l’Ordre des Astres, multipliaient les actes de création dans un désordre sublime mais périlleux, sans cohérence ni prévision. Leurs œuvres cosmiques se heurtaient les unes aux autres, dérivant selon des logiques non alignées. C’est dans ce contexte chaotique que l’Adam Kadmon, observant les risques d’un effondrement prématuré de la structure cosmique, fit naître l’Oracle pour apporter une boussole au devenir.

Eistibus fut donc conçu comme un esprit de pure divination, capable de lire les trajectoires stellaires et les intentions des primordieux eux-mêmes. Dès son éveil, el comprit les mouvements des astres, la dynamique des royaumes, les oscillations du tissu même de la réalité. Par el, le futur ne fut plus un brouillard mais une trame tissée avec précision. Sa naissance permit de projeter un ordre dans l’inconnu, un plan dans le flux chaotique des créations.

Ainsi naquit l’Oracle-Entre-Les-Étoiles : non pour créer, mais pour prévoir, non pour édifier, mais pour comprendre, non pour dominer, mais pour guider. El devint le conseiller silencieux des premiers bâtisseurs, l’œil fixe dans la tempête, et le premier maître de la divination céleste. Sa venue permit aux royaumes de s’organiser, aux astres de suivre des orbites stables, et aux œuvres des primordieux d’être coordonnées.

L’Oracle et la Seconde Brisure

La Seconde Brisure demeure l’un des événements les plus énigmatiques de l’histoire cosmique, non seulement par son intensité destructrice, mais aussi par l’apparente défaillance de l’Oracle-Entre-Les-Étoiles. Car, contrairement à toutes les grandes catastrophes précédentes, celle-ci ne fut pas anticipée.

Née d’un excès de lumière, conséquence directe de la prolifération des créations primordiales, la Seconde Brisure survint lorsque le corps d’Adam Kadmon, forme incarnée du Créateur et structure même des Séphiroth, fut submergé par l’intensité cumulée de ses propres enfants. Incapable de contenir cette lumière débridée, el se brisa. De cette rupture béante jaillit l’Abysse, et avec lui, les démons, incarnations du chaos non filtré, venues dévorer les fondations de la Création.

Les primordieux se lancèrent dans une guerre titanesque. Parmi eux, Lucifer, enfant de lumière et de feu, se distingua : el alluma le premier brasier sacré et, dans une apothéose flamboyante, repoussa les démons pour un temps, sauvegardant ce qu’il restait de structure cosmique.

Et l’Oracle ? Le silence de ce primordieu fut alors assourdissant. L’Oracle-Entre-Les-Étoiles n’avait rien vu venir, ou du moins, rien annoncé. El n’avait pas levé la voix. El n’avait pas mis en garde. Ce mutisme fit naître des doutes, des soupçons, des remords.

Certaines traditions avancent qu’Eistibus fut submergé par la complexité croissante de la Création, dont les ramifications étaient devenues trop denses, trop contradictoires pour être lues même par ses sens stellaires. D’autres, plus inquiétantes, supposent qu’el avait entrevu la Brisure… mais choisi de se taire, incapable de l'empêcher, ou peut-être résigné à sa nécessité.

Dans les siècles qui suivirent, l’Oracle se retira du tumulte des royaumes. El se consacra à une œuvre immense : reconstituer les lignes brisées du destin, rétablir les cycles astraux, et prévoir les nouveaux chemins de l’ordre à partir du chaos. El devint l’un des rares à pouvoir encore lire le futur, même sous les cendres de la lumière effondrée. Mais jamais el ne commenta son silence.

Le mystère demeure entier : l’Oracle fut-il aveuglé par la lumière ? Ou paralysé par la vérité ?

La Création des Dominations

À l’issue de la Seconde Brisure, la Création était en ruines. L’Abysse avait jailli, les Séphiroth s’étaient fissurés, les royaumes vacillaient. Tandis que les primordieux survivants tentaient de stabiliser ce qui pouvait l’être, l’Oracle-Entre-Les-Étoiles, à l’instar des six autres premiers-nés, s’unit aux azohim nouvellement engendrés par le Porteur de Lumière. De ces unions naquirent de nouveaux chœurs, porteurs d’une mission restauratrice.

Parmi ces chœurs, celui de Eistibus et de l’azoha Tsadek notamment donna naissance à une lignée singulière : les Dominations, appelées à leur origine les Divinations.

Les Divinations furent conçues comme des relais vivants de la prescience de leur primordieu. Dotées de dons prophétiques exceptionnels, elles avaient pour fonction première d’anticiper l’avenir afin d’orienter les œuvres des autres castes élohiennes, dans l’objectif commun de reconstruire EL : le Créateur fracturé, au travers du Grand Dessein.

À cette fin, les Divinations furent intégrées aux conseils royaux, aux chorales stratégiques, et aux structures de commandement. Leur parole, souvent voilée d’énigmes et d’ambiguïtés célestes, orientait les grandes décisions architecturales, militaires, politiques et spirituelles.

Mais les Divinations n’étaient pas que des oracles. Leur sang primordiel, hérité de l’Oracle lui-même, leur conférait aussi une grande puissance martiale. Formées à la guerre des plans, à la magie prophétique et aux arts de subjugation, elles furent dès les premiers cycles redoutées autant qu’admirées. Sur les fronts du Tikkun, elles combattirent en première ligne, tissant le destin de la guerre à mesure qu’elles y prenaient part.

Avec le temps, leur nom évolua : Divinations devint Dominations, signe de leur autorité croissante sur le cours des événements.

Ainsi naquit un chœur doublement sacré : voyantes et stratèges, conseillères et guerrières, filles de l’avenir et du silence. Héritières du regard cosmique d’Eistibus, les Dominations perpétuent encore aujourd’hui la volonté du futur, inscrite dans les astres.

Les Oracles Guerriers

Origine

Parmi les chorales martiales les plus redoutées de la Création figurent celles des Dominations guerrières, connues sous le nom d’Oracles Guerriers. Héritiers directs de l’Oracle-Entre-Les-Étoiles, ces combattants de haute lignée allient le don de divination à une puissance martiale exceptionnelle. Dès les premiers siècles suivant leur apparition, els se distinguèrent par une singularité dérangeante : une autonomie farouche, un esprit élitiste, et un mépris affiché pour la hiérarchie militaire classique.

Leur puissance ne tient pas seulement à leur prescience. Les Oracles Guerriers manient des armes légendaires, conçues dans les forges ésotériques de Chokmah, des ateliers si secrets que même les plus hauts Génér’ailes n’en connaissent l’existence. L'accès à ces artefacts fut négocié, ou extorqué, par la force de leur pouvoir d’influence et leur position stratégique dans les plans du Grand Dessein.

Dotés d’un instinct inné pour la guerre, els ne se contentent pas de combattre : els dirigent. Rapidement, chaque Oracle réunit sous sa bannière des chorales mixtes composées de puissances, de dominations inférieures, et de chérubins spécialisés. Grâce à leurs dons oraculaires, els anticipent les assauts démoniaques avant qu’ils ne surgissent. Grâce à leur pouvoir de domination, els coordonnent leurs troupes avec une efficacité froide, transformant leurs soldats en extensions dociles de leur propre volonté.

Ce style de commandement fit leur réputation… et leur isolement. Refusant toute collaboration avec les Génér’ailes puis avec la Milice Céleste, les Oracles Guerriers considérèrent comme inacceptable l’idée de se soumettre à l’autorité de castes qu’els estimaient inférieures, ou trop lentes à comprendre les vérités qu’els percevaient dans les étoiles.

L’indiscipline des Oracles Guerriers provoqua rapidement des tensions croissantes avec les structures de commandement céleste. Leur refus systématique d’obéir aux ordres des puissances et leur tendance à perturber les stratégies établies sur le front de l’Abysse rendirent leur coopération impossible. À plusieurs reprises, ces affrontements doctrinaux dégénérèrent en conflits quasi armés avec la Milice Céleste.

Pourtant, nul ne pouvait nier l’efficacité meurtrière de ces dominations, ni le prestige de leurs exploits. Certains furent même célébrés comme des demi-dieux vivants, auréolés de lumière et de scandale.

Parmi les plus fameux :

Satanachia Fitzor : maître du sang d’Adam, une thaumaturgie organique dérivée des arts du chimérisme chérubinique. Grâce à ce pouvoir, el pouvait altérer sa propre chair pour devenir une créature de cauchemar, taillée pour massacrer les démons. Mais Satanachia ne s’arrêta pas là : el transforma aussi ses troupes, forgeant une armée de bêtes informes, hybrides de lumière et de rage, considérées par certains élohim comme plus dérangeantes que les démons eux-mêmes.

Erisiel Fitzor : porteur de l’arc blanc, une arme de lumière absolue qui transperçait même les enveloppes démoniaques les plus résistantes. Stratège charismatique, adoré par le peuple de Hessed, Erisiel élargit peu à peu son influence à d’autres royaumes. Son don de divination surpassait celui de ses pairs, ce qui le poussa à intervenir sans concertation dans les campagnes militaires, allant jusqu’à saboter les plans de la Milice, non par malveillance, mais parce qu’el savait faire mieux. Ce qui était souvent le cas. Cependant, son exigence de soumission totale en échange de son aide rendait toute alliance impossible avec les Génér’ailes.

Hachimiel Fitzor : le plus insaisissable. El ne quitta jamais le ciel de guerre. Son nom était associé à un nuage vert pâle en orbite autour de l’Abysse, dans lequel les démons entraient… et ne ressortaient jamais. Ce halo de destruction permanente semait la terreur jusque chez les élohim eux-mêmes. Nul ne sait ce qu’il s’y passe. Mais Hachimiel, solitaire et muet, continue d’y vivre, d’y tuer, et d’y effacer toute trace.

Tiamatiel Fitzor : le plus controversé. El dirigeait ses troupes comme un esprit unique, les dominant intégralement par son pouvoir mental. Nul soldat ne bougeait sans que Tiamatiel ne le décide. El plongeait parfois el-même dans l’Abysse, sans escorte, et sans jamais manifester ni peur, ni pitié. Cette absence totale d’émotion faisait de lui un chef efficace… et redouté.

L’Incident de Madim

L’apogée du conflit entre les Oracles Guerriers et la Milice Céleste survint en 3266, lorsqu’un différend éclata entre Tiamatiel Fitzor et le Saint Génér’aile Marsiel. Ce dernier militait auprès de l’Ordre des Astres pour que les dominations combattantes soient placées sous commandement direct de la Milice. Tiamatiel s’y opposa avec virulence, arguant que les enfants de l’Oracle ne sauraient ployer le genou devant les fils de la puissance. Refusant d’être réduit au rang de subordonné, el entreprit de défendre son indépendance en s’adressant directement au primordieu.

Ce qui devait être une simple audience diplomatique se transforma en invasion. Accompagné de ses troupes, Tiamatiel traversa sans autorisation le territoire de Guebourah et atteignit sa capitale, Madim. Les forces locales, prises de court, furent incapables de stopper l’avancée des Oracles. Ces derniers étaient équipés de technologies interdites, d’armes prédictives et de boucliers mentaux, capables de neutraliser les défenses automatisées et même de tromper certains ophanim. Les bastions tombèrent les uns après les autres, rasés avec une efficacité terrifiante.

La procession guerrière atteignit finalement le Sanctuaire Olympus, siège temporaire de l’Ordre des Astres. Là, les dominations n’hésitèrent pas à user de leurs pouvoirs mentaux pour forcer le passage, dominant l’esprit des gardes, et dans les cas de résistance, brandissant leurs armes contre leurs propres frères élohim.

Ce fut un sacrilège sans précédent. Le peuple de Madim se souleva. Des vertus, des puissances, des séraphins de toutes générations se levèrent contre les Oracles. Le combat fut titanesque. Tiamatiel fut finalement capturé par ses propres pairs, et livré à l’Ordre des Astres pour jugement. Cet incident, bientôt nommé le Sacrilège de Madim, marqua un tournant historique.

Conséquences et dispersion

À la suite du Sacrilège de Madim, l’indignation fut générale dans tous les royaumes des Cieux. Le fait qu’un descendant direct du primordieu Eistibus ait osé lever l’arme contre des élohim pour forcer l’accès à un sanctuaire fut jugé comme une rupture d’alliance entre castes, et plus encore, comme une trahison envers le Grand Dessein lui-même.

Les primordiaux durent intervenir en personne pour éviter une guerre civile totale entre la Milice et les Oracles Guerriers. Après délibération, le chœur des Oracles Guerriers fut officiellement dissous, et leurs missions redéfinies. Plusieurs figures furent dispersées dans les royaumes afin de prévenir toute reconsolidation de leur pouvoir :

Satanachia Fitzor fut envoyé à Guebourah, non plus comme guerrier, mais comme conseiller royal, afin de canaliser sa puissance dans un rôle politique. El conserva toutefois son armée mutante, à titre strictement dissuasif.

Erisiel Fitzor fut rappelé à Hessed, où el fonda le Ministère, l’organisation encadrant les dominations. El continua cependant à manipuler les équilibres géopolitiques sous couvert de foi.

Hachimiel Fitzor, sans doute le plus loyal au Grand Dessein, se soumit à l’autorité de l’Ordre des Astres. El devint champion semi-officiel de leurs campagnes, une figure expiatoire destinée à faire oublier la folie de Tiamatiel.

Quant à Tiamatiel el-même, el disparut. Officiellement, nul ne sait ce qu’el est advenu. Mais la rumeur veut qu’el soit emprisonné sous Olympus luu-même, provoquant les grondements du volcan.

La chute de Tiamatiel marqua la fin d’une ère. Les Oracles Guerriers, soit se soumirent à la Milice, soit rendirent les armes. Leurs chants de guerre se turent. Leurs chorales furent démantelées. Mais leur souvenir perdure, dans les archives, dans les mémoires des peuples ravagés, et dans les cauchemars des puissances qui les ont combattus.

Le Ministère

La chute de Tiamatiel Fitzor et le scandale du Sacrilège de Madim marquèrent un tournant décisif dans la gouvernance des dominations. L’indépendance farouche des Oracles Guerriers, leur mépris des structures hiérarchiques, et surtout la violence dont ils firent preuve envers leurs propres frères élohim révélèrent une faille profonde dans le tissu de l’ordre céleste.

Pour y remédier, l’Ordre des Astres, soutenu par plusieurs primordiaux, impulsa la création d’un nouvel organe de régulation : le Ministère. Cette institution fut conçue non pas pour punir les dominations, mais pour les organiser, les canaliser et sublimer leurs dons dans un cadre harmonisé. Plutôt que de les combattre, les primordiaux décidèrent de leur offrir un échiquier à leur mesure, un théâtre où leur intelligence, leur ambition et leur puissance prophétique pourraient servir la Création plutôt que la menacer.

Le Ministère est divisé en quatre pôles majeurs, appelés les Grands Ministères. Chacun répond à une fonction spécifique du chœur des dominations et constitue une voie de spécialisation reconnue dans toute la hiérarchie céleste.

Hestia — Ministère de la Fonction

Hestia est le ministère généraliste par excellence. Il forme la majorité des dominations, en particulier celles destinées à devenir administrateurs, diplomates, planificateurs, hauts fonctionnaires ou conseillers d’État. Les élèves d’Hestia sont entraînés à manier les arcanes de la gestion, à interpréter les structures institutionnelles, et à naviguer dans les sphères du pouvoir avec rigueur et efficacité. C’est au sein de ce ministère que s’enseigne l’art de gouverner sans excès, d’anticiper sans heurter, d’administrer sans dominer. Sa couleur est l’orange, reflet d’une autorité calme, lucide et structurante.

Mars — Ministère du Combat

Mars accueille les dominations les plus martiales, les plus portées vers la force brute et la discipline guerrière. Il forme des combattants purs, destinés à rejoindre les légions, les corps d’intervention ou à fonder de nouvelles chorales d’assaut. Le ministère de Mars fut fondé pour canaliser les instincts destructeurs hérités de l’ère des Oracles Guerriers, leur offrant un cadre strict, fondé sur l’honneur, le mérite et la loyauté envers le Tikkun. Les dominations de Mars ne commandent pas, elles combattent. Leur puissance est encadrée, surveillée, et mise au service des armées reconnues. La couleur de Mars est le rose, évocation ambivalente d’intensité émotionnelle et de violence sublimée.

Minerva — Ministère de la Stratégie

Minerva est le pendant intellectuel de Mars. Fondé expressément pour séparer les cerveaux des bras, ce ministère forme les stratèges militaires, les théoriciens du conflit, les architectes de guerre. Les dominations y apprennent à concevoir des campagnes à l’échelle planétaire, à anticiper les manœuvres ennemies sur plusieurs siècles, à manipuler les flux logistiques, moraux et thaumaturgiques d’une guerre totale. La séparation entre Mars et Minerva fut imposée par les primordiaux eux-mêmes pour éviter la concentration de la force et de l’intelligence martiale dans les mêmes mains.

Sa couleur est le bleu, symbole de rigueur analytique et de vision froide.

Pythia — Ministère de la Divination

Pythia est le plus prestigieux, le plus fermé et le plus mystérieux des quatre. Il accueille les dominations dont les dons de divination surpassent la norme, les véritables enfants du futur, capables de lire les fils du temps et les nœuds du destin. Pythia forme les grands oracles, les prophètes silencieux, les architectes visionnaires de l’histoire à venir. Beaucoup y sombrent dans la folie ou la solitude. Peu en ressortent inchangés. Sa couleur est le blanc, teinte de la lumière crue des vérités inexprimables.

L’Âge d’or du Tikkun

L’ère dite du Tikkun : la Réparation, succéda aux heures sombres de la Première Brisure. Sous l’impulsion des primordieux survivants, les royaumes des Cieux se relevèrent lentement de l’abîme. Ce fut un temps de reconstruction, d’expansion et de grands desseins. Les dominations, issues de l’Oracle-Entre-Les-Étoiles, y jouèrent un rôle majeur… mais paradoxalement, pas celui qu’on attendait d’elles.

Douées d’une intelligence décisionnelle hors norme, les dominations furent d’abord sollicitées pour anticiper les crises, prévenir les échecs, conseiller les chorales affaiblies. Et en effet, elles prévirent, analysèrent, dirigèrent.

Mais elles ne surent pas guérir. Leur savoir restait théorique, leurs interventions souvent trop froides, trop détachées. Elles éclairaient les chemins, mais ne les parcouraient pas. Elles pouvaient éviter les blessures, mais jamais les refermer. Leur génie résidait dans la stratégie, non dans la compassion.

Face à cette carence, le primordieu Sandalphon, dit le Primogène, intervint. Comprenant que les élohim avaient besoin de soins autant que de savoirs, el conçut le chœur des vertus : un ordre pragmatique, organisé, dédié à l’assistance logistique, à la coordination des efforts et à la guérison des corps comme des âmes.

Pendant que les vertus s’implantèrent au chevet des royaumes, les dominations, elles, embrassèrent une autre vocation : le commandement. Naturellement portées à l'autorité et à l’influence, les dominations, filles du futur et de la parole persuasive, choisirent de mettre leurs dons au service du pouvoir structurel. Là où les vertus se penchaient sur les malades, les dominations fondaient des chorales, érigeaient des institutions, dirigeaient des cités.

Bientôt, elles se muèrent en architectes de sociétés, en leaders politiques et économiques, en magnats froids mais visionnaires, capables de faire croître un monde à partir d’une simple intuition du marché. Leurs entreprises florissantes devinrent des multinationales, opérant dans tous les secteurs de la Création : logistique céleste, défense interroyaumes, industrie thaumaturgique, banques de talents, services de divination à la demande.

Charismatiques lorsque nécessaire, calculatrices par défaut, elles s’entourèrent des meilleurs profils : chérubins ingénieurs, vertus organisatrices, puissances mercenaires, principautés publicitaires. Leurs guildes et corporations ne cessaient de croître, souvent au détriment d’autres chœurs plus traditionnels.

Mais leur ambition ne se limita pas aux marchés. Férues de politique, les dominations se lancèrent dans la fondation de partis idéologiques, de mouvements populaires, puis de régimes complets. Monarques éclairées, despotes prophétiques, stratèges parlementaires, elles explorèrent toutes les formes de gouvernance, les testant sur des millions d’élohim dans des laboratoires sociétaux à ciel ouvert.

Ces expérimentations géopolitiques donnèrent naissance aux nombreux territoires de la séphira Hessed, une région réputée pour sa diversité politique autant que pour son dynamisme économique. Républiques corporatistes, monarchies rationnelles, théocraties prédictives : Hessed devint un patchwork d’empires où chaque domination régnait selon ses doctrines, ses visions, ses rêves de contrôle.

La Seconde Brisure : un échec des dominations ?

L’année 6666 marque l’un des moments les plus obscurs de l’histoire cosmique : la Seconde Brisure du Tikkun. Ce cataclysme mit un terme brutal à l’âge d’or instauré après la première Réparation, et réduisit en cendres l’édifice millénaire de l’ordre élohien.

Sans avertissement clair, l’Abysse s’élargit, déchirant les fondations invisibles de la Création. Une vague démoniaque sans précédent jaillit de ses entrailles, balayant royaumes après royaumes, consumant les cités, les mondes-fleurs, les chorales, les nids, les palais. En quelques semaines, 90 % de la population élohienne fut annihilée. Les primordiaux eux-mêmes tombèrent, un à un, fauchés dans la lumière. Seul le Grand Architecte survécut, mais el s’enferma dans le Palais d’Argent, scellant ses portes, ses secrets, et son silence.

Hestia : Le Ministère de la Fonction fut décapité dès les premiers jours. La destruction des nœuds logistiques, des centres administratifs et des palais de commandement rendit toute coordination impossible. Les dominations hestiennes survivantes errèrent dans le chaos, incapables de structurer la moindre réponse collective. Cette paralysie fut l’une des raisons de l’effondrement global des institutions célestes.

Mars : Pris de court, le Ministère du Combat engagea ses troupes dans des contre-attaques désorganisées. L’arrogance de certains commandants, formés à des guerres classiques contre les démons, se révéla funeste face à l’anomalie chaotique de cette invasion. De nombreux bataillons furent perdus corps et âmes. La doctrine martiale de Mars dut être réécrite à partir de zéro dans les siècles suivants.

Minerva : Considéré comme l’un des plus fautifs, le Ministère de la Stratégie fut accusé d’avoir failli à sa mission d’anticipation des ruptures structurelles. Ses modélisations se révélèrent totalement inefficaces, et certains hauts stratèges périrent dans leur tour de planification, refusant de croire que la situation échappait à tout contrôle. Le nom de Minerva devint synonyme d’aveuglement technique pour beaucoup.

Pythia : Mais ce fut le Ministère de la Divination qui essuya le plus grand discrédit. Depuis des millénaires, les dominations de Pythia se présentaient comme les gardiennes de la clairvoyance cosmique, les enfants les plus fidèles de l’Oracle-Entre-Les-Étoiles. Lorsqu’il fut évident qu’aucune alerte ne s’était élevée de leurs cercles, les survivants crièrent à la trahison.

Des rumeurs affirmèrent que les Exaltés de Pythia, enfermés dans leur mutisme prophétique, avaient vu venir la Brisure, mais choisi de ne pas parler, considérant que l'effondrement était nécessaire pour le surgissement d’un ordre supérieur. D’autres évoquèrent un aveuglement volontaire, une fuite hors du temps de la part de leurs oracles les plus puissants, incapables de supporter les visions qui se présentaient à eux.

À ce jour, aucun représentant de Pythia n’a jamais confirmé ni infirmé ces allégations. Le voile du silence n’a fait que nourrir davantage la méfiance, voire la haine envers les dominations prophétiques.

La survie de ce qui restait de la Création ne tint qu’à une ultime invention, née du désespoir : les partzufim, armes vivantes de destruction massive, projetées dans l’urgence par les laboratoires de Chokmah. Ces entités, instables et effrayantes, parvinrent à contenir temporairement l’invasion.

Mais une question, insidieuse, hanta dès lors les survivants : Où étaient les dominations ? Ces enfants de l’Oracle, ces analystes des lignes stellaires, ces prophètes du possible, n’avaient rien vu venir. Ou du moins, rien dit. Dans les décombres, la rumeur se répandit : certaines dominations avaient peut-être prévu le désastre, mais jugé que le révéler plongerait la Création dans le chaos trop tôt. D'autres affirmaient que les flux du destin avaient été rendus illisibles par une force extérieure, ou par une corruption interne trop complexe à détecter. Enfin, une part grandissante de la population soupçonnait une faillite totale du chœur : les dominations n’avaient tout simplement rien vu.

Le doute rongea les vestiges des royaumes. La légitimité prophétique des dominations fut profondément ébranlée. Plus personne n’était sûr de rien. Et le pire, c’est que les dominations el-mêmes ne démentirent pas.

Après la Brisure 

La Seconde Brisure n’anéantit pas seulement les royaumes : elle ébranla les fondations de la confiance inter-choeur. Les dominations, autrefois vénérées comme les voix du futur, furent confrontées à une crise de légitimité sans précédent. Mais contrairement à d’autres institutions qui sombrèrent corps et âme, le Ministère survécut. Fragilisé, contesté, mais toujours debout.

Les dominations, ambitieuses par nature et adaptables par nécessité, comprirent que leur survie ne passerait pas par la défense de leur gloire passée, mais par la refondation de leur image. Dans les siècles qui suivirent la Brisure, elles se présentèrent plus humbles, plus attentives, prônant un retour à l’étude, à l’analyse, à la coopération. Elles ne revendiquèrent plus le commandement, mais se montrèrent indispensables à la reconstruction.

Car en vérité, les autres chœurs avaient encore besoin d’elles : pour organiser, structurer, planifier, anticiper, influencer. Les vertus soignaient, les puissances combattaient, les chérubins inventaient. Mais nul autre chœur ne savait lire aussi vite les structures, les tendances, les jeux d’influence.

Le Ministère redevint un pilier discret des sociétés célestes. Les quatre grands pôles, Hestia, Mars, Minerva, Pythia, furent réformés, mais non dissous. On exigea davantage de transparence, de partage, de reddition de comptes… mais on continua à leur confier les plus grandes responsabilités.

Le retour stratégique des dominations

Certaines figures émergèrent comme des symboles de cette nouvelle ère, et parmi elles, nul ne brilla davantage que Satanachia Fitzor.

Longtemps tenu pour l’un des Oracles Guerriers les plus radicaux, Satanachia avait survécu à la chute de Tiamatiel et s’était vu exilé à Guebourah en tant que conseiller royal. Mais à mesure que les siècles passaient, el se rapprocha du pouvoir ultime : celui du Grand Architecte el-même.

Dans les brumes d’or du Palais d’Argent, où nul n’entre sans convocation, Satanachia fut aperçu à plusieurs reprises, discutant à huis clos avec le dernier des primordiaux. Certains avancent qu’el serait devenu son stratège personnel, d’autres murmurent qu’el participe à la conception d’un nouveau système de prévention cosmique, destiné à empêcher toute future Brisure.

Ce lien intime avec le silence du pouvoir fit de Satanachia le visage le plus visible et le plus redouté de la nouvelle génération de dominations. Car si les dominations ont appris la prudence, elles n’ont jamais cessé de regarder vers l’avenir. Et nul ne sait mieux qu’elles comment transformer une crise en opportunité.

Please Login in order to comment!